Bouddhisme Tendai – Etude #1

Etude

Bouddhisme Tendai – Etude #1

Textes principaux

L’Ecole Tendai est une secte du bouddhisme Mahayana (Grand Véhicule). Son sutra fondamental est le Sūtra du Lotus. Le bouddhisme Tendai tient de nombreux textes en haute estime, le Sūtra du Lotus étant le summum. De nombreux principes Tendai et une grande partie de sa philosophie découlent de ce texte, comme l’accent mis sur les moyens habiles, ou opportuns (upāya) et le véhicule unique (au sens d’ultime). D’autres textes influents incluent le Sūtra du Coeur,  le Traité de la Grande Perfection de la Sagesse, l’Éveil de la Foi dans le Mahāyāna, le Tantra Mahāvairocana et les Sūtras des Terres Pures, pour n’en nommer que quelques-uns. Le bouddhisme Tendai est également fortement influencé par les premiers textes indiens, tels que les Āgamas.

Les écrits les plus influents de son fondateur, Zhiyi, sont collectivement connus sous le nom de Trois grands traités du Tendai:

  • La signification profonde du Sūtra du Lotus

  • Mots et phrases du Sūtra du Lotus

  • Grand Śamatha et Vipaśyanā (pratique de méditation)

Trois vérités

Selon Zhiyi, les trois vérités sont les suivantes:

  • Tous les phénomènes sont vides. Cela signifie que nous ne sommes pas une entité statique et permanente qui existe en dehors de quoi que ce soit. Nous sommes en permanence en état de totale interdépendance avec tous les autres phénomènes et nous changeons à jamais.

  • Tous les phénomènes ont une existence relative (quoique temporelle). C’est la reconnaissance qu’il existe une existence relative. Nous pouvons voir une chaise ou nous-mêmes dans le miroir et les reconnaître. L’existence est une condition temporaire et repose sur des causes, soumises aux lois de l’origine dépendante. Mais nous ne pouvons pas le nier.

  • Les deux sont vrais en même temps – c’est ce qu’on appelle le Milieu. Connue sous le nom de “vérité du milieu”, elle reconnaît que les deux vérités précédentes sont simultanément valables. Les phénomènes sont à la fois vides et existants temporairement, donc, les trois vérités sont une vérité, car l’une contient les trois et les trois contiennent l’une.

Ce concept fait partie intégrante de la philosophie Tendai et est pratiqué comme méditation contemplative afin de surmonter une vision erronée. Trois types de contemplation sont possibles:

  • La contemplation sur la vacuité – qui consiste à surmonter la fausse vision de la permanence et à comprendre notre relation avec tous les phénomènes dans la chaîne de l’origine dépendante

  • La contemplation sur l’existence relative – qui consiste à surmonter la fausse vision du nihilisme et l’idée qu’en raison de la vérité de la vacuité, rien n’a vraiment d’importance et l’effort est futile

  • La contemplation sur la vision équilibrée – qui consiste à comprendre le concept “un en trois – trois en un” et de réaliser ainsi notre vraie nature

Cinq périodes et huit enseignements

Zhiyi, utilisant des exemples trouvés dans les Sūtras du Lotus et du Nirvana, a classé la littérature bouddhiste en Cinq Périodes, ou Saveurs. Ces saveurs commencent avec du lait pur et se déplacent à travers un processus de crème, de caillé, de beurre et de ghee, illustrant sa compréhension que les Cinq Périodes sont comme des étapes que les pratiquants doivent franchir.

Les cinq périodes 

  • La Première Période – La Soudaine, la Doctrine Distinctive

    La Première Période correspond au Sūtra de l’Ornement Floral (Huayan). Chih-i a mis ce Sūtra dans la première période car il pensait qu’il contenait le premier discours du Bouddha; c’est pourquoi il est appelé Enseignement Soudain. Ce sūtra était destiné aux Bodhisattvas avec des capacités supérieures, une doctrine complète pour ceux qui ont de grandes capacités, donc il est considéré comme combiné avec l’opportunisme. Ainsi, il est considéré comme une doctrine distinctive. 

  • La Seconde Période – Le Graduel, le Secret, la Méthode Variable, la Doctrine Tripiṭaka

    La Deuxième Période, connue sous le nom de Période du Parc aux Cerfs (Āgamas / canon Pali), correspond à la doctrine Tripiṭaka, représentant une méthode progressive d’enseignement. Selon Chih-i, le Bouddha a enseigné cette méthode à ceux n’ayant pas encore des capacités supérieures. La doctrine Tripiṭaka est pour ceux qui s’efforcent de devenir des Arhats – ceux qui échappent à l’existence cyclique, pour ne jamais revenir. Cet enseignement met l’accent sur le non-soi des Cinq Agrégats, le non-attachement et le dépassement de la souffrance en s’appuyant sur les Quatre Nobles Vérités, le Noble Octuple Sentier, les Douze Liens d’Origine Dépendante et les techniques de méditation du Canon Pali. 

  • La Troisième Période – Le Graduel, le Secret, la Méthode Variable, la Doctrine Partagée

    La Troisième Période – Période des Enseignements Élargis – utilise toujours la Méthode Graduelle mais élargit encore les concepts du Tripiṭaka. Ces textes louent généralement Mahāyāna et critiquent Hinayāna, et sont appelés contrastés parce qu’ils opposent les mots complets du Mahāyāna avec les demi-mots du Hinayāna. En d’autres termes, ils opposent le Tripiṭaka, l’enseignement partagé, le distinctif et le complet.

  • La quatrième période – Le Graduel, le Secret, la Méthode Variable, la Doctrine Partagée

    La Période de la Sagesse (Prajñā) correspond aux Sutras du même nom, dont on dit qu’ils nettoient toutes les illusions. Ceci est considéré par beaucoup comme le début de l’enseignement idéal du Bodhisattva – le désir de sauver tous les êtres sensibles. Cette période s’étend sur l’enseignement de śūnyatā et illustre comment chaque phénomène est vide. La réalisation de ces enseignements ne se fait pas par l’analyse cognitive mais par la perspicacité, qui cède la place à Prajñā.

    Contenus dans les première, seconde, troisième et quatrième périodes, nous avons également la Méthode Secrète et les Méthodes Variables. La première est appelée “secrète” car elle n’a été donnée qu’à ceux qui sont capables de la comprendre. Si ceux qui n’en ont pas la compréhension l’entendaient, ils perdraient la foi et abandonneraient le chemin. La seconde est enseignée par des moyens opportuns, en fonction des capacités des auditeurs.  

  • La cinquième période – La doctrine complète

    La Période des Sūtras du Lotus et du Nirvana est caractérisée par ces Sūtras, dans lesquels le Bouddha donne son enseignement final. Bien que les enseignements précédents semblent contradictoires, leurs différences ne sont que des moyens opportuns permettant aux êtres d’être témoins de la vérité, qui est révélée dans le Sūtra du Lotus et répétée dans le Sūtra du Nirvana. Chih-i a encore développé cela dans son enseignement sur la Triple Vérité. Ce que cet enseignement illustre, c’est que bien que les diverses doctrines représentent des moyens opportuns, elles ne sont pas fausses. Telle est la doctrine pure et complète qui est contenue dans le Sūtra du Lotus, établissant l’Ekayāna, le Véhicule Unique du Bouddha. 

Il a également divisé les sūtras en huit catégories – communément appelées les “Huit Enseignements” – dont quatre représentent des méthodes d’enseignement et quatre sont la doctrine elle-même. Ces différentes catégories sont comme une recette de cuisine où différents ingrédients sont combinés pour amener les êtres sensibles à l’illumination. Tout le monde passe par ces étapes, mais ceux qui ont des capacités plus élevées peuvent pénétrer le Dharmadhātu à n’importe quel stade, il n’est pas nécessaire d’attendre.

Les huit enseignements 

  • Le Soudain

  • Le Graduel

  • Le Secret

  • Le Variable

  • Le Tripiṭaka

  • Le Partagé

  • Le Distinctif 

  • Le Complet

Trois mille réalités en un seul instant de conscience

Que nous soyons conscients ou non, trois mille réalités coexistent à chaque instant de notre conscience. C’est le fondement de la philosophie Tendai. Selon le Grand Manuel pour Calmer l’Esprit / Discerner le Réel et basé sur le Sūtra du Lotus :

“Ce que nous appelons Perfection Soudaine, c’est de relier notre esprit à la réalité dès le début et de visualiser l’objet de l’esprit. Ceci est en fait identique à la Voie du Milieu. Ce n’est pas différent de la vérité conceptuelle. Lorsque notre esprit se rapporte au Royaume du Dharma, même nos formes visuelles et notre parfum ne diffèrent pas de la Voie du Milieu. Notre monde, le monde du Bouddha, le monde des êtres sensibles, ou les cinq agrégats, sont tous, en fait, les expressions de la Voie du Milieu.”

Trois mille réalités comprennent chaque existence phénoménale. Notre monde se compose de dix royaumes, chacun des dix royaumes des êtres comprenant les neuf autres royaumes. Par conséquence, il y a cent royaumes. Les Dix Modalités d’Expression de la Vie (十如是 jū nyoze1La Sagesse du Sûtra du Lotus, vol. 1, p. 176) du Sūtra du Lotus (Chapitre 2) sont imbriquées dans les cent royaumes. Ainsi, chacun conçoit mille royaumes. Ces mille royaumes sont multiples dans les trois royaumes de l’existence, c’est-à-dire celui des êtres sensibles, celui des êtres non sensibles et celui des cinq agrégats – qui constituent in fine tous les êtres, sensibles ou non sensibles.

Dans le bouddhisme, les dix royaumes ou modes d’existence sont les suivants:

  • Enfer

  • Fantômes Affamés

  • Animaux

  • Ashuras (la Colère)

  • Hommes

  • Devas

  • Śrāvakas (auditeur / disciple)

  • Pratyekabuddhas ( “bouddha solitaire” ou “bouddha pour soi” ; désigne un être qui atteint la libération, le nirvana, ou l’éveil, par et pour lui-même)

  • Bodhisattvas

  • Bouddhas

Concernant les Dix Modalités d’Expression de la Vie, ce principe clarifie les dix aspects ou les dix facteurs communs à toute vie, et ce, dans les Dix Etats. Les êtres humains, dans l’état d’enfer comme dans l’état de bouddha, sont dotés de façon égale de ces Dix Modalités d’expression de la vie.

La sagesse du Bouddha consiste en une perception et une compréhension complètes de la véritable entité de tous les phénomènes (shoho jisso) qui est, elle-même, mise en lumière par les Dix Modalités d’expression de la vie (jū nyoze).

Ces modalités sont énumérées dans le deuxième chapitre “Hoben” du Sûtra du Lotus: “La réalité ultime de tous les phénomènes ne peut être comprise et partagée que par des bouddhas. Cette réalité consiste en l’apparence, la nature, l’entité, le pouvoir, l’influence, la cause inhérente, la relation (ou cause externe), l’effet latent, l’effet manifeste, et leur cohérence du début jusqu’à la fin.” (SdL-II, 43)

  • L’apparence (nyoze so) désigne l’aspect visible, le corps et la forme des choses. Elle correspond donc à l’aspect physique

  • La nature (nyoze sho) indique les dispositions ou qualités inhérentes qui ne peuvent être perçues directement de l’extérieur. Elle correspond à l’aspect spirituel

  • L’entité (nyoze tai) est la réalité individuelle ou l’essence de la vie qui pénètre et intègre l’apparence (l’aspect physique) et la nature interne (l’aspect spirituel)

Les six modalités suivantes, qualifiées de fonctions dynamiques de la vie, sont :

  • Le pouvoir (nyoze riki) : la force ou l’énergie potentielle inhérente à la vie 

  • L’influence (nyoze sa) : l’énergie manifestée, le mouvement ou l’action produits lorsqu’une potentialité latente est activée

Note: Le pouvoir et l’influence présupposent l’effet latent et l’effet manifeste

Les quatre modalités suivantes expliquent comment nos actions nous amènent à passer de l’un des dix états à l’un des neuf autres.

  • La cause interne inhérente (nyoze in) est la cause latente directe de changement, inhérente à la vie, qui produit un effet particulier, bon, mauvais ou neutre

  • La relation ou cause externe (nyoze en) est la cause secondaire ou le stimulus extérieur qui aide une cause interne à produire son effet, à savoir le changement intérieur et extérieur

  • L’effet latent (nyoze ka) désigne l’effet direct produit dans les profondeurs de la vie quand une cause interne est activée par une cause externe

  • L’effet manifeste (nyoze ho) indique le résultat concret perceptible qui apparaît comme conséquence d’une cause interne et d’un effet latent

  • La cohérence du début jusqu’à La fin (nyoze honmatsu kukyoto) implique que les neuf modalités précédentes, de l’apparence jusqu’à l’effet manifeste, constituent un tout cohérent selon l’état de vie. La même cohérence se manifeste dans l’état d’enfer, aussi bien que dans l’état de bouddha.

Tous les êtres des dix états, de l’état de bouddha jusqu’à l’état d’enfer, possèdent la structure commune des dix modalités d’expression de la vie. Mais chaque modalité est caractérisée par l’état de vie dominant de la personne.

Aymeric.G

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